Ne laissez pas la Fifa vous tromper plus tard, lorsque le président Gianni Infantino parlera de son ton motivé de la meilleure Coupe du monde de tous les temps, car c’est ce qu’il va faire. Clair et vrai. Réalisez que c’est un non-sens. Oui, à certains égards, il a raison, par exemple au sens logistique. Mais pour toutes ces merveilles du monde des stades, des routes, des métros et autres, un prix si élevé a été payé par les migrants qu’il est déjà salace de mentionner que la Coupe du monde est un tel succès.
Parlons foot. Nous sommes assis ici au Qatar à regarder trop de versions sur-organisées, surmenées et grincheuses du jeu original, avec si peu de différence dans les dernières étapes du tournoi que qui gagne est plus ou moins une question de chance. Une occasion manquée, un arbitre qui ne donne pas de carton rouge, un penalty sur le poteau, une pointe de provocation ; cela peut être suffisant pour obtenir un tour de plus.
Dans le pays complètement inventé qu’est le Qatar, on assiste à un football presque complètement dirigé, le tour de passe-passe des entraîneurs, qui disent que les autres jouent aussi au comptoir et de manière compacte, et qu’ils n’ont pas le choix. Ils sont ensemble dans la conspiration contre la liberté de pensée et de fantaisie. Presque tout le monde se joint parfaitement à la polonaise de la destruction, avec la victoire comme moment d’alléluia.
Mais le football, surtout une Coupe du monde, c’est aussi un divertissement. Le foot c’est l’aventure. Ce n’est que lorsqu’il y a un but rapide que l’autre pense : merde, essayons aussi de trouver l’aventure. Sam Planting avait un point dans cette colonne d’échange lundi, quand il a regardé au-delà de l’hystérie du succès ou de l’échec. « Avec un football tout sauf étincelant, mais solide sur le plan défensif, les Pays-Bas ont réalisé une excellente performance », a-t-il observé à propos de l’Orange.
Son commentaire n’est qu’un. Si les Pays-Bas avaient perdu contre l’Argentine dans un match palpitant, tout le monde aurait été en paix. Atteindre ensuite les quarts de finale aurait en effet été un excellent exploit pour une sélection pas exceptionnellement talentueuse avec trop de joueurs sans forme.
Seulement : jusqu’à la 70e minute, il ne s’est quasiment rien passé du côté des Pays-Bas, tout comme lors des duels précédents. Frenkie de Jong était un travailleur assidu au lieu d’un sky stormer sur les coups de pied. Nous nous attendons à ce que Denzel Dumfries représente le plus grand danger. Maintenant qu’on en est là, il est grand temps, avec tout le respect que je dois à Dumfries, de penser à l’entraînement, à la tactique, à tout en fait.
Dans l’ensemble, nous voyons trop peu de football qui est plus que de la tension, des trucs tactiquement guindés et un drapeau peint sur la joue. L’enfant qui reçoit un ballon pour son anniversaire, sort et ne veut rien de plus que jouer avec ce ballon, est devenu le pro calculateur qui n’a plus nécessairement besoin du ballon. Le football de réaction comme Saint Graal.
Le Maroc n’a le ballon que 30 % du temps, car il dresse un mur devant son but et laisse presque toute l’initiative à l’adversaire. Ils défendent cela d’une manière formidable, mais les Marocains sucent aussi la vie du football. Supposons qu’ils gagnent contre les Français mercredi, alors c’est une sensation, aussi peut-être formidable pour l’intégration, pour le monde arabe, pour la libération de l’ancien colonisateur et pour ce qui est ajouté par les universitaires. Mais pour le football lui-même : s’il vous plaît, que ce soit la France.
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