Le gouvernement français du président Emmanuel Macron et de la Première ministre Élisabeth Borne a décidé de faire passer la réforme controversée des retraites devant la Chambre basse française. Elle craint de ne pas avoir la majorité lors d’un vote. La constitution offre cette possibilité et le parlement ne peut alors bloquer la législation que par un vote de défiance et la chute du gouvernement. « Un coup permanent », ça sonne à gauche. Plusieurs partis d’opposition ont annoncé vouloir déposer une motion de censure.
REGARDER. Le Parlement français dans la tourmente après que le gouvernement a fait adopter une réforme controversée des retraites sans vote
A moins d’une heure de l’ultime séance à l’Assemblée nationale, une nouvelle réunion de crise débute à l’Elysée. Macron a réuni autour de lui plusieurs ministres et dirigeants du camp présidentiel. C’était la quatrième réunion en moins de 24 heures. Le gouvernement de Borne n’a pas de majorité à la chambre basse, ce qui en ferait un jeu d’enfant d’approuver la réforme des retraites tant discutée.
En fin de compte, le gouvernement français contourne désormais le Parlement en invoquant l’article 49.3 de la Constitution. Selon un participant à la consultation, on a estimé qu’il y avait « trop d’incertitude sur le vote ».
La session au parlement a alors commencé par des huées. Il y eut une grande agitation et les parlementaires commencèrent à chanter l’hymne national. La session a été suspendue pendant une courte période, mais cela n’a donné aucun résultat. Le Premier ministre a été hué et certains députés ont réclamé la démission de Borne et de son gouvernement.
« Ne pariez pas »
« Nous ne pouvons pas parier sur l’avenir de nos retraites. Et cette réforme est nécessaire », a déclaré Borne.
Elle a déclaré qu’une approbation de la réforme ne recueillerait guère quelques voix. « Si tout le monde avait voté en toute conscience et conformément à ses positions passées, nous ne serions pas dans cette situation. » Elle a également souligné que le projet de loi actuel n’était plus la proposition initiale du gouvernement, mais que le texte avait été créé après un compromis au parlement.
« Caprices du président »
Olivier Faure du parti d’opposition socialiste PS a fermement condamné « les caprices du président ». Manuel Bompard du parti également de gauche La France insoumise parle sur Twitter d’un « coup d’Etat permanent ». « Le peuple est contre eux. Débarrassons-nous d’eux », écrit-il.
De 62 à 64 ans
La réforme des retraites prévoit, entre autres, une augmentation de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans. Le Parti républicain (Les Républicains) en particulier était profondément divisé sur la question. Après quelques concessions, le parti semble prêt à voter la réforme, mais le risque est trop grand que tous les députés du parti ne le fassent pas.
En tout cas, l’invocation de l’article constitutionnel spécial est considérée par les analystes comme une défaite pour Borne. Elle et Macron avaient précédemment déclaré qu’ils feraient « n’importe quoi » pour éviter ce scénario.
Le Sénat a approuvé ce matin un texte de compromis. Le camp de droite y est majoritaire. La proposition a été adoptée avec 193 voix pour et 114 contre.
Motion de méfiance
La politicienne d’extrême droite Marine Le Pen a déclaré qu’elle déposerait une motion de censure contre le gouvernement car le Premier ministre « ne peut pas rester en fonction ». « C’est le constat de l’échec total » de la politique du président Emmanuel Macron, poursuit le chef de file du Rassemblement national (RN).
Selon le journal Le Monde, le chef du parti d’opposition de gauche La France Insoumise (LFI) a également annoncé un vote de défiance. « Il n’y a aucune légitimité pour cette loi », semble-t-il.
Les syndicats annoncent de nouvelles actions. Leur allure sera décidée ce soir en concertation intersyndicale.
Protestations
En France, les gens sont de nouveau descendus dans la rue jeudi pour exprimer leur mécontentement face aux régimes de retraite du gouvernement. Ils ont érigé des barricades et y ont mis le feu. À Paris, la police anti-émeute a tiré des balles en caoutchouc et déployé des gaz lacrymogènes et des canons à eau sur la place de la Concorde, une place près de la Chambre des représentants française, où des milliers de manifestants s’étaient rassemblés. Dans la soirée, des agents ont mené des charges pour repousser et disperser les manifestants. Au moins 38 militants ont été arrêtés dans la capitale.
Les médias français ont fait état de troubles dans plusieurs villes, dont Lyon, Marseille, Toulouse et Dijon. A Lille, deux manifestants ont été hospitalisés pour des blessures. A Rennes, des abribus et une agence immobilière ont dû payer.
REGARDER. Les rues de Paris sont jonchées de détritus de grèves contre la réforme des retraites
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