Qu’a dû penser la famille de Seamus Elliott alors qu’il parcourait la France à vélo en maillot jaune ? Né dans un quartier populaire de Dublin, Elliott a pratiqué des sports tels que le hurling et le football gaélique dans sa jeunesse. Les deux sports irlandais traditionnels qui n’impliquent ni roue ni selle.
Néanmoins, Elliott est devenu un pionnier du cyclisme irlandais, le prédécesseur de héros nationaux du cyclisme tels que Stephen Roche et Sean Kelly. Un prédécesseur oublié, certes, mais il l’est devenu.
Ce n’est qu’à l’adolescence que Seamus, plus connu sous le nom de « Shay », découvre le vélo. Il a participé à des courses dans son propre quartier, Coolock. Il était condamné à une bicyclette de piètre qualité, si bien qu’il ne pouvait que contempler les belles bicyclettes dont disposaient les vainqueurs de ces petites courses.
Un kilo de thé et beaucoup de chocolat irlandais
Mais sur son vélo cliquetant, Elliott l’a lancé loin. Si loin, en fait, qu’il a commencé à conduire au-delà des frontières nationales – sur le continent européen. Dans sa valise : un kilo de thé et beaucoup de chocolat irlandais.
Elliott a appris ce que c’était que de courir les courses en Belgique et en France en tant qu’amateur. C’est là que réside la force d’Elliott : son état d’esprit. Il était petit et un peu potelé pour un cycliste, mais l’exemplaire professionnel français Louison Bobet l’a félicité. Un « flahute », c’est ainsi que Bobet décrivait le nouveau venu irlandais. En d’autres termes : un fonceur pour qui aucune course ne peut être trop dure.
Avec sa persévérance, Elliott a forcé un contrat professionnel. Il est devenu le premier étranger à remporter l’Omloop Het Volk. Et lors de son premier Tour de France, également la première participation irlandaise, il a battu sans effort son coéquipier Brian Robinson. Le journal sportif français L’Équipe a décrit Elliott à l’époque comme quelqu’un qui était « préoccupé comme une mère poule ». Donc un caractère maternel et attentionné.
Mais Elliott avait aussi un autre côté. Dès qu’il en a l’occasion, il vise son propre succès : dans le Giro et la Vuelta qui lui valent le maillot de leader. Ses plus grands succès sont encore à venir, en 1963.
Il est devenu le premier Irlandais à prendre le maillot jaune du Tour de France, après avoir remporté l’étape du vélodrome de Roubaix. Pendant trois jours, il chevaucha dans le justaucorps jaune par la France.
Voilà pour les moments forts de la vie d’Elliott. Parce qu’aussi vite qu’il s’est frayé un chemin vers le sommet, si rapidement après ses meilleures performances, il a plongé dans de profondes vallées. Son mariage a pris fin. Il a ouvert un hôtel en Bretagne, mais il a fait faillite. Des soucis d’argent. Des polémiques aussi, sur son passage en tant que pilote de course. Il aurait délibérément serré les freins et bradé les prix. Il a également inventé des histoires sur l’usage du dopage; quelque chose qui n’a évidemment pas été apprécié par le monde du cyclisme.
Blessure par balle
En 1971, Elliott a été retrouvé mort dans son entreprise de métallurgie et celle de son père. Il a été blessé par balle au cœur. Sa cause de décès n’a jamais été complètement élucidée et est donc restée entourée de mystère. Était-ce suicidaire ? Un accident? Il était endetté envers un syndicat du crime breton. Était-ce un règlement criminel?
Beaucoup de questions, mais les réponses ne sont jamais venues. L’homme qui portait le jaune bien avant les héros cyclistes irlandais Sean Kelly et Stephen Roche n’a vécu que jusqu’à 36 ans.
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